L’amour qui me tormente, Manuscrit d’Uppsala, Uppsala University Library MS 412 (c.1560-1570)
par Cyril Gilbert :
Facsimilé de la pièce en question… si vous voulez suivre !
La source utilisée pour cet enregistrement est la tablature de Pascale Boquet tirée du volume 46 de la collection le Secret des Muses consacré à Morlaye.
La réduction au luth de chansons polyphoniques est une pratique très courante à la Renaissance. Le Catalogue de la Chanson Française à la Renaissance du programme Ricercare du CESR de Tours indique que la chanson dont il est question ici doit être de Cléreau ou bien de Roussel ou encore de Caiétain, mais comme je n’ai pas les partitions, je ne peux pas préciser…
Le poème mis en chanson est de Jean-Antoine de Baïf, l’Amour qui me tourmente tiré des Amours de Francine publié en 1555.
L’Amour qui me tourmente
Je trouve si plaisant
Que tant plus il s’augmente
Moins j’en veux estre exemt :
Bien que jamais le somme
Ne me ferme les yeux,
Plus amour me consomme
Moins il m’est ennuyeux.
Toute la nuit je veille
Sans cligner au sommeil,
Remembrant la merveille
Qui me tient en éveil,
Me representant celle
Que je voy tout le jour,
De qui l’image belle
Travaille mon sejour.
Toute nuit son image
Se montre devant moy :
Le trait de son visage
Tout tel qu’il est je voy :
Je voy sa belle bouche,
Et je voy son beau sein,
Ses beaux tetins je touche,
Et je baise sa main.
Le jour si ma Maistresse
Favorable m’a ris,
Il faut que j’en repesse
Toute nuit mes espris.
Si d’une oeillade gaye
Elle m’a fait faveur,
La nuit sa douce playe
Me chatouille le coeur.
S’elle égaye la place
De son bal gracieux,
Toute la nuit sa grace
Recourt devant mes yeux :
Si en douce merveille
J’ay ouy sa chanson,
Toute nuit en l’oreille
J’en regoute le son.
O heureuse ma vie
De jouïr d’un tel heur !
Non, non, je n’ay envie
D’avoir d’un dieu l’honneur,
Puis qu’à souhet je passe
Et la nuit et le jour,
Recueillant tant de grace
Du tourment de l’amour.